Au cœur des Andes, à environ cent kilomètres au nord-ouest de Cusco, l’ancienne capitale inca, se déploie la Cordillère Vilcabamba, dominée par le sommet du Salkantay (6264 m). Orientée sud-nord, cette chaine montagneuse qui glisse vers l’Amazonie est entaillée de profondes vallées et canyons, offrant un relief des plus accidentés et appréciés pour les divers étages écologiques qu’il présente. Vilcabamba est une région de transition entre Andes et Amazonie, où le climat permet des cultures variées. Est-ce ce qui poussa les rois et empereurs incas, et peut-être ceux des civilisations les ayant précédés, à en coloniser une partie ?
Si proche de Cusco, et pourtant si méconnue, cette région n’est véritablement explorée que depuis un siècle : isolée par son relief mouvementé, elle est cependant le berceau du mythe de la « cité perdue des Incas », la ville où le dernier roi inca se serait réfugié en 1539 après avoir définitivement perdu sa capitale occupée par les conquérants espagnols. Choquequirao, Corihuayrachina, Vitcos, Ñusta Hispana, Vilcabamba, Machu Picchu sont autant de sites archéologiques découverts lors d’expéditions de recherche du dernier bastion des Fils du soleil. Ce n’est que dans les années 1970 qu’on reconnut finalement en Espiritu Pampa la Vieille Vilcabamba, incendiée par les Espagnols en 1572 après la capture du dernier rebelle inca, puis abandonnée à la voracité de la végétation tropicale.
Malgré cette ultime découverte, la Cordillère de Vilcabamba n’a pas cessé d’intriguer et de passionner. Traversée en tous sens de chemins précolombiens, elle est loin d’avoir révélé tous ses secrets. Pourquoi, en effet, les Incas y ont construit autant de villages, haut perchés, constitués de temples et de bâtiments de noble facture ? Les restes archéologiques sont rares et moins bien conservés que dans les Andes, où le climat est plus sec, et les moyens mis en œuvres pour de sérieuses études archéologiques largement sous-estimés par le gouvernement péruvien. Ce qui ne permet pas, aujourd’hui, d’élaborer une théorie fiable.
Pour le trekkeur en quête de vastes espaces inviolés, cette cordillère offre ce qu’il y a de plus mystérieux et impressionnant en terme de paysages et de vestiges archéologiques. En partant de Cachora, à trois heures trente de véhicule de Cusco, un trekking de neuf jours permet en effet de relier trois des grands sites incas découverts à ce jour, et ce en empruntant, sur plusieurs kilomètres, un tronçon du Qapaq Ñan (grand réseau de chemins incas). Loin du trop fameux Chemin de l’Inca ralliant le km 82 au Machu Picchu, la sente pavée empruntée entre Choquequirao et Vitcos traverse un paysage époustouflant de puna (montagne) et de yunga (piémont) où seules quelques fermettes de pierres et de paille indiquent une présence humaine. Puis entre Vitcos et Espiritu Pampa, le passage de cols et de lacs d’altitude offre une transition spectaculaire avec le climat doux et tropical de la plus connue des cités incas. Le dernier tronçon avant d’arriver à Machu Picchu s’effectue en voiture, mais n’offre pas moins d’impressionnants points de vue.
Voilà un itinéraire exceptionnel dont la confidentialité semble pourtant en sursis : le projet de construction d’un téléphérique de cinq kilomètres de long permettant à plusieurs centaines de personnes de traverser chaque jour le canyon de l’Apurimac et de rallier Choquequirao est aujourd’hui en standby pour raisons juridiques. Par ailleurs, entre Choquequirao et Vitcos viendra bientôt la route en provenance de l’est, permettant aux touristes pressés de découvrir en une journée le site de Corihuayrachina.
Il est légitime d’espérer que le développement touristique de la région entrainera de sérieuses études archéologiques permettant de comprendre la valeur et le rôle des cités préhispaniques de Vilcabamba. En attendant, il reste encore quelque temps aux passionnés d’aventure pour découvrir, au rythme de leur pas et dans le silence d’une nature intouchée, l’une des plus mystérieuses cordillères du pays.
RandoSpirit vous invite à un trek hors du commun, mêlant nature, culture et spiritualité.
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